J'empêche l'accès à ma viande intérieure... | 25 novembre 2008


"Viens voir j'te dis."
Je m'approche et regarde, dans le trou creusé dans le plâtre du mur.
"C'est quoi?
- Un corps..."
Je ne suis pas plus effrayé que ça. Des corps morts, on s'en est coltiné des tas. A s'en gaver, à s'en faire exploser le bide des yeux. Quelque chose comme ça.
Polo appuie légèrement sur mon épaule, avec sa main gauche.
"Tu fais quoi là?
- Ben vas voir...
- Le courage du Portugais tiens.
- C'est pas ça, c'est que tu vois mieux qu'moi dans le noir."
Derrière, la télé hurle. Personne ne parle dans le salon. Ils sont absorbés par les nouveaux programmes. Des programmes chinois qui, en boucle, passent du sport, essentiellement.
Je suis accroupi devant le trou. Et je me sens fatigué. Epuisé. ça pue bien sûr la mort, mais un courant d'air se glisse contre nous, apportant des odeurs de terre humide et de verdûre printanière. Nous nous prenons au jeu et humons en mimant, sur les traits de nos visages, le plaisir qui assure notre humanité en faillite...
"Alors c'est quoi ça?
- Ben un cadavre..."
J'empoigne le tissu qui couvre la courbe du dos raide et gelé. Il se déchire carrément, dès que je tire fermement, et une nuée de miasmes se jette quasiment sur mon visage. Les yeux fermés. Les narines contractées. Les lèvres vérouillées, j'empêche l'accès à ma viande intérieure... Automatismes d'ouvrier des ordures. ça pue à vomir mais la poussière, le plâtre font un peu obstacle à ce violent soulevement d'horreurs olfactives... Les minutes se mélangent à ce dégoût.
"Annule tous mes rendez-vous ma poule... Je crois qu'on est sur une grosse affaire!"
Nous nous mettons à rire aux éclats... J'imite TOUTES LES SERIES AMERICAINES EN DEUX PHRASES!
Mon Usine, la suite... (Passage supprimé du roman)
Andy Vérol

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