Fier comme une Vénus de Milo à braquemart


La chose la plus douteuse n'était pas de nous caresser nos zizis menus, c'était de sortir de la niche du chien, frocs baissés, sous les yeux écarquillés des enfants qui revenaient de l'école. Je reprends, hein, il fallait marcher avec les petits poils entre les dents et sous la langue, au milieu, il fallait marcher au milieu des rigolards, leurs gourdes à la main, les shorts remontés jusqu'au cul des pectoraux. Se faufiler, s'enfiler des sifflets faux dans les tympans, et remonter l'impasse, regarder la 4L du père Thibaut, les grosses mains liquides de la mère Dendu puis gravir la route bleue-noire qui menait direct au quartier des Genets. "Alors les p'tits pèdes, on se suçai la bite oh les pèdes, on s'met des p'tits doigts droit dans l'cul". Marcher et être suivis par la foule humiliante aussi timbrée qu'un HP vramé au chalumeau... Les dents qui grincent, les pinceaux recroquevillés dans les bermudas. Au ciel, il y avait Dieu qui nous lâchait des caisses dans les cheveux. Et soudain Bruno, Papy, fier comme une Vénus de Milo à braquemart. Tous les gosses riaient, on se prenait des coups de roseaux sur les cuisses, on saignait du nez, on faisait dans le slip à poche, l'kangourou... Le jugement sous le regard des parents silencieux accoudés aux fenêtres, fumant des clopes, sirotant des canettes de bière, se curant les dents avec les ongles. hein, je reviendrai là-dessus, là-dedans, l'humiliation, les petits jambes à menu qui pleure dedans peut pas dehors qui pleure dedans et peut pas dehors et mis de force à genoux, insultes postillonnées. Même les arabes jouaient les compagnons des vieux nazillons pour groupusculer contre les "petits enculés, les pèdes, les pendouilleux de la dégueulasse à la tête gaineuse, les caresseux crasseux, les pouilleux du trou d'balle". Hein la honte, l'humiliation, la prostration, les rires, les gentils avec les méchants, les méchants avec les gentils, les gros, les jeunes les vieux les enfants les chiens qui levaient la patte sur nous et hilare, le peuple hilare et les coups de roseaux dans le dos sur le cul sur le panpan baissé les mollets le sang le nez qui coule les larmes le hoquet le chiale les cris les urines les méchants les gentils les arabes les chinois les nazis tous réunis pour le fouet sur le cœur le chétif des p'tits gars qui, tiens, hein, qui se pelaient les fesses avec la langue dans la niche du chien, la cachette, la molletonnée, la confortable, les caresses criminelles, les léchouilles assassines, les méchants puis les gentils, l'enfant faible allongé sous les coups sous les rires sous les insultes sous les silences lourds des papas des mamans... 

Extrait de Robert de Niro n'est plus un héros. A paraître prochainement. 

Léonel Houssam

Commentaires

on a dit…
ça me donne super envie de lire le reste....
c'est beau

Articles les plus consultés