l'offre n°0458875R | 23 août 2012

L'offre n°0458875R me proposait de déclencher des incendies dans des zones dites de non-droits pour le compte d’un organisme gouvernemental secret. Salaire de 6000 euros, défraiements et mutuelle. On me fournissait les vêtements (camouflage ou déguisements divers) ainsi qu’un véhicule banalisé. Je crois. Je ne sais plus exactement. Et j’ai postulé, je l’ai fait, j’ai cramé une cage d’escalier à la Courneuve, deux voitures dans un parking à Saint-Denis, et une estafette dans un parking souterrain de Cergy-Pontoise. C’était assez stressant, si bien que je buvais beaucoup de shots de vodka avant de me rendre sur les lieux. Mais avant toute chose, j’eus un entretien, tiens, pas une thune, des névroses terribles amplifiées par la sensation d’inutilité et d’humiliation à être au chômage. Je sais que c’est idiot, drôle aussi, d’imaginer que l’on est de pauvres choses fébriles lorsqu’on ne travaille pas. Il y a de ça oui, parfois, mais généralement, on conspire avec la paresse, la glande zombie devant des programmes télé mollassons. Les frasques d’un bodyperfect, les états d’âme d’une poêle antiadhésive, les histoires de cul d’une vieille peau cramée par les feux de l’amour…Vivre ainsi, séduit par des guerriers soucieux de piller une cité fabriquée de toutes pièces durant des semaines. Dark Vador en 3D, les Trolls en embuscade toute en enquillant un calendos complet et un pot de fake de Nutella…Pour l’entretien, j’avais mis mon beau et unique costume, un canif dans la poche et un CV plié en quatre. Je passe la chose. Les parodies, les descriptions, les histoires d’entretiens avec un boss, ça court les écrans. J’ai obtenu le job. Bon salaire, risques évidents et un ventre bien plein. M’en foutais. A 55 ans, pas de femme, pas de gosse, pas d’avenir, plus de rêves et une furieuse envie d’en finir…
Le 16 mai 2016, je fus rattrapé par mon destin. Alors que je foutais le feu à l’appart’ vide d’une vieille maghrébine, un de ses fils rentra. Il me défonça à coups de pieds et de couteaux, me trainant ensuite sur le carreau jusqu’au seuil de l’immeuble. Vers 18 heures, un petit black de 6 ans découvrit ma dépouille et prévint son père. Personne ne pouvait rien pour moi. J’étais soulagé. J’étais mort, bel et bien mort. Le plus gros était fait. C’est con cette histoire, mais le fait de l’écrire de l’au-delà, ça fait plaisir hein ?
Andy Vérol

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