On ne rate pas sa vie | 03 août 2012

Tes petites journées libres à changer les couches, à chercher une nouvelle couette à Ikéa, tes instants de bonheur à choper 80% de réduc trouduc sur un achat groupé, menu mexicain pour deux, apéro offert... Tes séances de barbeuque entramis, tes moments étranges où tes yeux nagent dans le vide pour oublier que tu ne savoures qu'une idée: devenir riche et ramer dans la profusion du confort des plaques rouges bizarres qui commenceront à couvrir ton corps dès demain...
Ta racine-carrière, tes problèmes de salaire... La suinte sinistre d'un bus qui reproduit des cons tout au long d'un circuit sinistre à travers l'heure-hop.
La main sur le levier de vitesse, tu sens la pesanteur chiante de l'air lourd d'une-heure-avant-l'horreur, l'orage clinquant qui bling-blingue au crépuscule, un follicule expulsé par un ciel chargé d'humidité, un bas de contention atmosphérique engonçant l'anneau cutané du crâne...
Le venimeux des yeux d'une fille payée smic à la caisse du supermarché, le rêve à travers les codes-barres, les bidules sous plastiques transparents, la belle allée de produits alignés... Le chouette d'une maman de substitution qui capitonne ma faculté de penser avec des néons criards juchés au-dessus de rayon bien rangés, carrelage premier prix couleur crème, et crustacés zigouillés dans la bouche avec respect des règles héros peineuses de sécurité alimentables...
Près de la bande d'arrêt de jus rance, les magasins s'enfilent en partouze dans la zone commerciale XXL en solde... Un mec en costard payé par Securitas, traine au cul des clients qui ont l'air fauchés...
Le fiasco de leurs retours vacances, leurs vies de stress et le ronron risible d'un discours sur la crise et la dette permanentes, un temps de rappel des soirées grillades et pizzas du Lol'iday pour masteuriser le viandox en gorge d'une vie d'famille forcément heureuse dans le sirocco infect d'une haleine alcoolisée... Soudain, le sexe ne servait plus à rien, tu t'souviens?
Et juste avant de créer cette usine, j'ai dû arrêter de gueuler dans la rue, de désirer des mineurs, de fumer, de picoler, de féculer, de refuser, ... J'ai dû commencer à carte à créditer, à divorcer, à traverser des continents entiers troués de périphéries commerçantes... J'avais dû m'adapter pour finir par crever vivant, évider un autre pour compenser mes nerfs, les nids douillets, les caddies jolis, les routardises formulées dans les guides... Des vies sans un millimètre de menace de guerre et de bombardement... Simplement des portiques de triple matraque empêchant l'accès aux quais, des portiques hurlants à l'instant d'une panique électronique soudée à mon corps...
Deux millénaires pour s'inventer des vies en enfer, un flux moyen de vulve qui s'irrigue à moitié et un vit qui durcit que dans la tête du têtu qui tente l'en-dedans d'une meuf endormie... Le lent lié au grouin de l'obligation de chercher un taf truffé de tas d'merde...
Avec tes blanches et tes tongs fluo... Mon Los Angeles mythique, c'est ma vie en vrai... Y'a des gens qui travaillent chez "Ticket Restaurant", c'est chelou nan? J'aime pas les gens qui travaillent dans des conseils généraux.
TF1 depuis 25 ans. Le présentateur change, le discours pas: "Les jeunes sont de plus en plus violents, consomment de plus en plus d'alcool, et sont de plus en plus nombreux à fréquenter les boites de nuit et autres lieux nocturnes POURTANT INTERDITS AUX MINEURS!"...
J’éteins la télé, il y a des paillettes dans mon lait… Une lueur vicieuse s’installe en oblique au centre de la pièce. Une crise de nerf en guise de pendentif cérébral, un état léthargique comme cadeau offert par une solitude involontaire.
Andy Vérol

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