Le paradis/enfer, 72 vierges bien chaudasses dans un spot de pub pour Total.





10 septembre 2011: Je choisis ou je ne choisis pas. Je choisis entre une émission sur les porcs qu'on blinde d'antibiotiques néfastes, qu'on égorge comme... des porcs et les enfants autistes qui pourrissent la vie de leurs reproducteurs qu'on égorge comme... des porcs. Je choisis ou pas, je regarde les trolls hurler sur mes comptes Facebook ou Twitter.... Ils se foutent bien de l'enfant qui dégorge dans la besace d'un flic-chasseur-Gestapo-G.I... Je ne choisis pas. Je me penche à gauche et je vide le vin sur le tapis. Je suis où? Le téléphone sonne. Alice a respiré dans le combiné. J'en suis persuadé.


11 septembre 2011: voilà je raccroche. Je pose défait ma ceinture, je passe le cure-dents de l'incisive droite à l'incisive gauche et je fais ma voix enrouée de celui qui sait face à celui sait moins: "Eh gush. On s'est bien marré ce soir. J'me sens défoncé mais bizarrement, j'ai l'impression d'avoir retrouvé mes esprits. J'ai le lardon de nouveau à sa place. Enfin bon, mets toi en slip maintenant que j'vois de quoi t'es capable ". Il se met un peu sur le côté, cambre son cul et ronronne.


12 septembre 2011: la chambre est nue, déshabillée devant moi, lascive mais froide, avenante mais tendue. Mes valises alignées près de la porte d'entrée (de sortie en l'occurrence). J'ai passé un petit coup de torchon ici et là parce que j'avais honte des taches de sang, de gerbe et d'excréments. Difficile de dire combien de temps j'ai passé ici. Je sais simplement que mon journal, ces dix minutes que je lui consacrais chaque jour, me permettra de retrouver la trace de ces vies parallèles. Je crois m'être tapé la face contre le mur porteur de la connerie, j'ai tenté d'exploser une montagne à coups de cuillère à pot. ça n'a pas fonctionné. Je suis toujours au chômage, dépité, flasque... Cet isolement initiatique m'a donné quelques réponses: il n'y a pas de haine et d'amour dans le monde, il n'y a que des verres ébréchés, des maîtres tarés et des esclaves paumés. J'ai fait partie de cette dernière catégorie. Tenter d'échapper à son statut dans ce monde, c'est bien ça: s'asseoir sur son présent et s'en remettre à un futur totalement imprévisible.


13 septembre 2011: l'Occident a envahi le Machrek, le Maghreb, l'ensemble du Moyen-Orient, a surarmé des tarés incultes, des rois merdiques du désert, des djihadistes pour sucer leur croûte terrestre, des socialo-dromadistes pour y expurger son pus noir, grosse verrue mondiale qui a permis de remplir la bagnole de l'essence nécessaire pour rejoindre l'hôtel des vacances-à-chier ou le camping des congés-payés-pour-déglinguer ou le village-vacances pour la famille-qui-pousse-des-caddies... Les nouveaux féodaux ont mis les peuples occidentaux dans le grand Guantánamo mondial: un frigo, des boîtes d'antidépresseurs, des assurances pour tous, des péages à chaque coin de rue... Le paradis/enfer, 72 vierges bien chaudasses dans un spot de pub pour Total. Odeur de Tabasco dans la ceinture de plastique, fumet d'enflure dans le chargeur de l'arme automatique, barres chocolatées à 2000$ dans la station-service Texaco. Je conduis la Simca non sans fierté. Elle est belle comme une princesse de Walt Disney, gentille, pétaradante, rutilante, attirant des hommes frisés aux chemises ouvertes sur un tapis de poils bruns... Je fume une tige, une Gauloise, sublime cibiche américaine aux couleurs des mythes franchouillards... Un cerveau en vitrocéramique.


14 septembre 2011: Si les frontières du monde sont trop étroites, si Dieu a donné le droit à une espérance de vie de plus de 40 ans, qu'il a balancé l'être sur un territoire pas trop tronçonné par la famine et la guerre, tu peux choisir de pousser ces frontières, de te crever les yeux pour mieux entendre, pour mieux sentir, pour mieux glisser sur les vastes toboggans intérieurs... Tu peux contrôler et te laisser dévaster, tu peux croupir, te laisser envahir, tu peux te révéler devant un miroir explosé, les orbites oculaires évidés... et découvrir les nouvelles frontières... J'ai souvenir de l'enfant, de sa venue au monde, de sa mère fantomatique, de cette impression de savourer ma propre déchéance dans le corps croissant du petit être. Qui est le spectre de qui?

Extrait de roman en cours. Des fois je dis le titre, des fois je le dis pas, des fois, j'en donne un faux, des fois je dis le vrai... Tu vois quoi... Si tu veux la mouture complète, faudra t'acheter le livre oh!

Léonel Houssam

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