Vider une bonne assiette de ses cheveux



Je referme les rideaux. Derrière, le linge est bien plié, les souvenirs et leur chaude-pisse avec. Ma valise est prête. Une femme hurle qu'elle veut une part de tarte aux myrtilles. Même pas je pense qu'elle est folle. Je me dis plutôt qu'elle aussi aura bientôt son billet de retour vers le non-rien-j'ai-rien-dit-désolé, la vie dans une bol vide, le tic tac du temps qui joue comme un saut à l'élastique. Quelqu'un lui a administrée du bon, de l’élixir pour qu'elle cesse d'avoir envie, pour qu'elle commence la thérapie. Madame Martine me dit que le taxi m'attend. Je lui demande si je peux lui faire la bise. Dans ma tête, je pense que je reviendrai dimanche prochain pour vider une bonne assiette de ses cheveux, de ses poils. Elle accepte la bise. Sa joue est douce. C'est une feuille de soie. Elle me sourit avec une vague sincérité puis m'accompagne jusqu'au couloir. Les gens-là sont mes copains, sont ma famille, ils sont le monde.

Léonel Houssam
(last lines?)

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