Et des heures à manipuler ces chimères génitales
Photo de Yentel Sanstitre: http://yentelsanstitre.blogspot.fr/
Le bruit de la climatisation, les néons et leur lumière
clinique, les fraises sur la tête et les voix tendant au murmure comme si des
prothèses de testicules avaient besoin de silence pour croître et « s’épanouir
». A l’intérieur, nous étions des taulards volontaires, des laborieux fliqués
par des caméras et des gardes chiots menaçants : « Des comme toi, y’en a dix
qui attendent dehors ». Et des heures à manipuler ces chimères génitales…
Avec l'accent lourd du Jura, cette façon de dire mollement,
presque débilement, le chef de service, notre manager, nous invitait à doubler
la cadence. J'appliquais un enduit, la bouche et le nez couverts d'un masque
blanc, mes yeux protégés par des lunettes translucides et l'ensemble de mon
corps enveloppé dans une combinaison ample, blanche, légèrement transparente.
Muni de mon pinceau, je couvrais chaque couille de ce produit avant de la
laisser repartir sur un tapis roulant. On ne se parlait pas, on ne se regardait
pas. J'étais dans ma bulle, dans la mécanique répétitive de mes gestes, dans
une sorte de Non-zone cérébrale. J'étais un zombie de bric et de broc, un tronc
de chair secoué par les gestes automatiques.
Léonel Houssam
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