Mon système nerveux était une barre de pool-dance filandreuse




Les jambes se croisaient, se décroisaient. C'était un peu comme si je flirtais avec mon système nerveux, qu'il était une barre de pool-dance filandreuse à laquelle je m'accrochais en ondulant. La lueur dans les yeux du monstre froid. Les doigts de Jacques jouant d'un stylo, d'une règle... De ce bonhomme charismatique et flippant ne restait plus qu'une sorte d'ombre déphasée, un dessin d'antimatière sur le mur blanc. Je déballai la vérité. Je laissais Martin chasser les dernières barrières, la haie d'angoisse s'ouvrant sur la clairière, les mots audacieux, la main de fer, la crise de névralgie soudaine qui solidifia littéralement toute la partie droite de mon visage jusqu'à la commuer en roche solide, un bloc dur... "J'ai envie de tout te dire. Toi et ton bonhomme, vous me faites pas peur. Tu me foutras en taule, tu me feras ratatiner par ces chiens de ratés, tu me feras passer sur le corps par les pires rats mouillés que notre temps dégueule mais je vais te dire, je vais pas m'excuser de ce que j'ai fait, de l'acte d'amour sincère, total". Je m'agitais. Je n'en avais pas conscience, si bien que je sentis deux pressions froides autour de mes poignets. Le sbire venait de me menotter dans le dos. Mes cuisses tremblaient, il scotcha mes chevilles aux pieds de la chaise. Et ça ne calma pas ma ferveur, ça n'entama pas ma rage, mon envie d'amour et de mort. Je ne parlais pas moi seul, je parlais en deux, je parlais en jumeau, je tentais de me défaire des liens, mais rien n'y faisait, j'avais mal à la gorge tellement je hurlais. Lui, l'antithèse de lui-même campait sur son siège de Capitaine sans émettre le moindre son, peut-être sans doute parlait-il mais je n'entendais rien. "Je lui ai fait la toilette, et j'ai pris soin de tout faire dedans, qu'elle féconde sous mes yeux, que son teint rosisse. Mais ça ne venait pas. Son visage ne changeait pas en bien, elle n'avait pas les joues toutes douces et les mains gracieuses qui vont bienveillantes dans les cheveux du petit enfant. J'avais besoin qu'elle me rassure. Pourtant c'est pas faute de l'avoir prévenue. Je l'ai brusquée mais pas que, je l'ai aussi caressée, je l'ai rassurée. Je ne savais plus quoi faire. Parfois je lui bandais les yeux pour qu'elle imagine autre chose que la chambre moche, qu'elle se voit avec moi dans une grosse baraque toute blanche baignée dans le soleil, ses reins ondulant sur moi, mais non, il n'y avait rien à faire". J'avais mal. Ma chair se déchirait. Le sang devait déjà s'écouler de mes poignets aux bouts fins de mes doigts. Divine furie.

Léonel Houssam

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