Presque mort mais jovial





Chronique du quotidien pathétique : On appréhende la salle d’attente, le voisin un peu trop bavard qui prend tout le monde à partie, son gros bide, son nez qui coule sans cesse, cette morve qui dégouline lorsqu’il parle de ses résultats d’examen catastrophiques, qu’il ne lui reste plus que six mois à vivre. Il a un gros ventre à la peau blanche pleine de veines qui dépasse de son tee-shirt souillé. « J’ai un foie complètement pourri avec les métastases partout qui sont remontées jusqu’aux poumons et y’en a même dans le cerveau alors hein ». Envie de lui dire de fermer sa gueule « c’est pas mon heure putain, moi j’ai encore une semaine à passer au village-vacances, alors ta gueule, prend ton avion et barre-toi ». Il attend la dame, son chauffeur qu’il appelle « son amoureuse ». Jovial, presque mort mais jovial, insouciant ou faisant semblant de l’être. C’est pas bien de penser comme ça, il faut avoir de la tristesse, de la compassion, mais il n’y a que de la peur, de l’envie de courir, partir, retourner dans le paradis terrestre, un centre commercial, une ferme bio, que sais-je ?! Mais pas lui, pas lui et la clique des malades. Qu’ils crèvent, qu’ils vident les lieux et me laissent prendre mes résultats à moi qui sont plutôt bons, qui sont une remise de 50% sur ma durée de vie… Bénéfice net : sensation d’immortalité jusqu’à l’heure du couché. Le gros malade se lève, se perche sur sa canne. Je le salue de la tête, bonne face d’hypocrite : « Bon ben, bon courage alors… »
Je suis un connard… mais je me soigne.

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